Symptômes de la dépression silencieuse : quand c’est le corps qui pleure…

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a qualifié la dépression de « plus grand défi auquel l’Europe est confrontée au XXIe siècle », une définition confortée par les chiffres, qui indiquent que 3,8 % de la population mondiale en souffre.

En France, près de trois millions de personnes ont reçu un diagnostic de dépression, ce qui en fait la maladie mentale la plus répandue dans notre pays.

La dépression est répertoriée comme une maladie dans le « Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux » (DSM V), qui la considère comme une humeur dépressive pendant la majeure partie de la journée, accompagnée d’une diminution considérable du plaisir ou de l’intérêt pour des activités précédemment appréciées.

Les chiffres de prévalence ne concernent que les personnes diagnostiquées. Mais il pourrait y en avoir davantage car, dans de nombreux cas, la maladie ne se manifeste pas directement, mais seulement par des sentiments de tristesse, et beaucoup ne sont pas diagnostiqués. La dépression a de nombreux visages.

Dans certaines situations, la dépression s’exprime par des symptômes physiques plutôt que psychologiques. Il s’agit d’un état connu sous le nom de dépression silencieuse, masquée ou cachée, qui n’est pas reconnu dans les classifications internationales des troubles mentaux.

Qu’est-ce que la dépression silencieuse ?

De nombreuses personnes souffrent de dépression sans en avoir l’air : elles vont au travail, participent à des activités sociales ou vaquent à leurs occupations quotidiennes sans problème apparent. Mais au fond d’elles-mêmes, elles se sentent épuisées parce que tout est un combat.

L’American Psychological Association (APA) définit la dépression masquée comme un « épisode dépressif majeur au cours duquel le patient se plaint de symptômes physiques plutôt que de troubles de l’humeur et pour lequel aucune cause biologique ne peut être trouvée pour les symptômes physiques ».

Les patients qui en souffrent viennent souvent consulter un médecin en se plaignant de diverses douleurs organiques qu’ils ressentent au quotidien. Mais l’origine de l’affection est psychologique, ce qui finit par affecter le corps physiquement.

En fait, on estime que jusqu’à 10 % des personnes fréquentant les services de soins primaires présentent des symptômes de dépression, mais que jusqu’à 50 % des cas passent inaperçus.

Plus précisément, ils appellent à un changement du modèle de soins de santé mentale en raison de l’incidence élevée des troubles mentaux et de la « nécessité de changer de stratégie et de s’engager en faveur d’un service psychologique stable dans les soins de santé primaires ».

Les symptômes de la dépression masquée, au-delà de la tristesse et de la mélancolie

Loin de ce que l’on pourrait penser, les principaux symptômes de la dépression masquée ne sont ni la tristesse ni la mélancolie, qui restent à l’arrière-plan. Selon la Société Française de médecine familiale et communautaire (semFYC), on estime que la dépression en soins primaires se manifeste par des plaintes physiques dans 45 à 95 % des cas.

Le patient parle généralement de plaintes somatiques et comportementales, d’altérations somatiques et de troubles physiques qui masquent souvent la présence d’une dépression :

  • Troubles neurologiques : les céphalées, les maux de tête ou les paresthésies sont l’un des symptômes les plus fréquents. Ils sont généralement de nature tensionnelle et d’intensité légère à modérée.
  • Troubles neurovégétatifs : asthénie, lipothymies ou hyperhidrose.
  • Troubles sensoriels : vertiges ou acouphènes.
  • Troubles digestifs : nausées ou troubles du rythme intestinal.
  • Troubles cardio-circulatoires, troubles du rythme cardiaque
  • Autres troubles : fatigue, troubles du sommeil, perte de poids, impuissance, alopécie, dyspnée, démangeaisons cutanées ou eczéma, entre autres.

Ces symptômes somatiques sont plus fréquents chez les femmes, en particulier les femmes enceintes, les personnes âgées, les enfants ou les patients souffrant de maladies organiques associées. La symptomatologie décrite rend le diagnostic difficile car elle masque souvent le véritable trouble.

La plupart du temps, cela implique un long voyage de spécialiste en spécialiste, ce qui retarde le diagnostic. Car, presque toujours, le patient lui-même ne comprend pas ce qui lui arrive parce que la dépression est cachée sous une fatigue diffuse ou des douleurs indéfinies.

Mais le trouble sous-jacent est un trouble dépressif qui comprend des symptômes typiques tels qu’une humeur maussade, une perte d’intérêt pour certaines activités, un sentiment de culpabilité inapproprié, une capacité de concentration réduite et, dans les cas les plus graves, des idées suicidaires.

Un traitement s’impose dès que possible

Lorsque la dépression répond aux critères du trouble dépressif majeur, comme la tristesse ou la mauvaise humeur, le diagnostic est posé plus tôt que lorsqu’il s’agit d’une dépression somatisée.

Ce retard augmente la probabilité que l’état psychologique devienne chronique et altère la qualité de vie de la personne, car d’autres complications médicales et psychiatriques peuvent survenir. Un traitement le plus précoce possible permet d’éviter cette chronicisation et, en particulier, la douleur.

Le traitement commence généralement, comme pour tout autre type de dépression, par des antidépresseurs ou une intervention psychologique, voire les deux en même temps si le médecin le juge nécessaire.

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